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Avant d’y participer, merci de lire notre guide d’animation évolutif réalisé avec le concours de Charlotte Ogier, Céline Poret (facilitatrices) et de Noé Guiraud (Les Greniers d’Abondance). L’article ci-dessous précise nos intentions concernant ce temps d’animation.
La Théorie du Boxeur nous invite à découvrir le quotidien des agriculteur.ice.s confronté.es au dérèglement climatique et à plonger dans la complexité des systèmes agricoles et alimentaires. L’idée est bien de faire évoluer notre regard sur l’agriculture, de comprendre où se trouvent les leviers de changement et les blocages… Vers une démocratie alimentaire. Le film aborde plusieurs aspects de ces problématiques pour permettre une lecture plus systémique et sortir de l’approche « en silo » qui consiste à analyser les enjeux indépendamment les uns des autres.
→ On cherchera donc dans l’animation à souligner les liens qui existent entre les différentes composantes de ce « système » : le rôle de l’échelle locale où les collectivités ont des leviers de soutien de l’agriculture, l’échelle régionale où plusieurs terroirs peuvent échanger des denrées et créer un début de résilience alimentaire comme le montre l’initiative Coolivri du GRAP, l’échelle nationale qui oriente le contexte social, technique et économique pour les filières agricoles, l’échelon européen qui décide des grandes orientations agricole, finance et contrôle les fermes via la PAC, l’échelon mondial qui fixe des règles sur le libre échange et le commerce international via l’OMC. L’intégration des filières agricoles d’amont en aval et la très grandes situation de dépendance des agriculteur.ice.s lié.e.s à ces systèmes globalisés et également importante à souligner.
Certes, les mangeurs et mangeuses ont le pouvoir de soutenir les filières locales et les labels de qualité, mais il semble réducteur de considérer qu’ils auraient à eux seuls le pouvoir de changer les choses par leur acte d’achat. On le voit, les leviers pour développer une agriculture locale et de qualité sont multiples et passent par un soutien du politique à plusieurs niveaux.
Si la France et l’Europe jouent un rôle décisif pour façonner le système agro-alimentaire, on pourra dans l’animation mettre en avant les leviers d’actions que nous avons en local pour favoriser la production et l’accès à une nourriture de qualité et la résilience alimentaire, et interpeller les élus. Certains exemples lié au développement des circuits-courts et à la commande publique sont présents dans le film et d’autres sont à retrouver dans cet excellent ouvrage « Qui veille au grain ?» des Greniers d’Abondance, accessible en ligne et en librairies. .
→ Un autre objectif de l’animation est d’encourager un dialogue devenu difficile entre les agriculteur.ice.s et sensibiliser les citoyen.ne.s souvent éloigné.e.s des réalités agricoles. Si les récentes mobilisations agricoles ont permis de mettre en lumière un mal-être agricole profond et ancien qui se cristallise autour de la course au rendement et du problème de la rémunération, les publics peu familiers avec la ruralité perçoivent parfois les agriculteur.ice.s comme des « empoisonneurs ». Le film rappelle qu’ils sont les premières victimes de ce système et qu’ils sont souvent prisonniers d’injonctions contradictoires : produire pour nourrir, à prix toujours plus bas, tout en respectant de hauts standards écologiques… Équation par nature impossible. Le film montre que l’opposition gros/petits n’est pas pertinente car toute l’alimentation n’a pas vocation à être produite localement sur de petites surfaces (même si l’agrandissement à outrance est évidemment un danger).
→ Nous cherchons donc lors de l’animation à ne pas opposer les modèles agricoles entre eux mais plutôt à permettre à différents points de vue de s’exprimer et dialoguer. La souffrance d’une catégorie d’agriculteurs qui se sent stigmatisée est réelle. Beaucoup ne viennent d’ailleurs pas en projection pour cette raison ou restent sur une position très défensive lors des échanges, se sentant vite agressé.e.s.
L’utilisation de produits phytosanitaires issus de la chimie dont on connaît l’effet désastreux sur la santé humaine, la vie des écosystèmes et sur l’eau est au cœur de ce rejet. L’agro-industrie et les lobbies ayant verrouillé fortement le modèle en place, le bio semble condamné à n’occuper qu’une marge (environ 10% des surfaces en France). Beaucoup de producteurs bio devant même repasser en conventionnel faute de débouchés avec la crise actuelle des filières bio liée à l’inflation. Si la sortie de la chimie devrait être un objectif politique, on ne peut rejeter la faute sur les seuls agriculteurs d’épandre ces produits. Un récent sondage de l’institut BVA rapporte que 62% des agriculteurs estiment que la transition écologique est une nécessité et 23% considèrent même qu’il s’agit d’une opportunité, loin du cliché véhiculé par les médias et en décalage avec les prises de position de la FNSEA contre l’extension des surfaces en jachère par exemple.
Si le film insiste sur la nécessité d’une transition agroécologique, celle-ci ne pourra se faire que si elle est plébiscitée par le plus grand nombre d’agriculteur.ice.s et ne semble pas imposée et dogmatique. Prendre le temps d’entendre des points de vue et des vécus divergents sur ces sujets est fondamental et peut permettre de recréer une écoute et de l’empathie là où des oppositions idéologiques prévalent.
Pour nous donner les moyens de faire évoluer les systèmes agricoles y compris sur les grandes cultures céréalières, nous devons tendre la main à ces agriculteur.ice.s qui sont victimes de ce modèle productivistes, en souffrent -même s’ils gagnent souvent bien leur vie- et finissent bien souvent esseulés sur de très grandes surfaces comme l’a montré l’excellent documentaire « Tu nourriras le Monde » tourné en Champagne crayeuse.
Il faut aussi accepter que cette transition ne pourrait s’effectuer qu’à l’échelle d’une génération, et que beaucoup de systèmes en place ont une grande inertie du fait des conservatismes et de l’endettement des fermes qui interdit tout virage radical à court terme.
→ On pourra mettre en lumière la nécessité de faire pression sur le politique pour qu’il “planifie” cette transition des modèles agricoles, seule opportunité d’éviter un désastre en termes de résilience alimentaire et de biodiversité selon de nombreux experts comme l’institut Solagro qui a réalisé le scénario Afterres 2050. L’enjeu est bien aujourd’hui celui de l’installation de nouvelles générations à même de mener ces transitions agro-écologiques. 50% des agriculteurs installés prendront leur retraite dans les 10 ans ! Mais sortir d’une logique d’agrandissement à tout prix, faire de la place pour de nouveaux installé.e.s ne semble pas non plus aller de soi, une fracture culturelle et idéologique l’empêche encore dans les campagnes. L’accaparement des terres par les firmes de l’agro-industrie et la finance mondiale semble être un obstacle majeur au renouvellement des population comme le dénoncent le rapport de Terre de Liens sur la propriété des terres agricoles en France ou le livre « Reprendre la terre aux machines » de l’Atelier Paysan qui propose un plaidoyer pour une agriculture plus locale, humaine et agroécologique.
Le changement climatique vient challenger tous les agriculteur.ice.s. Celles et ceux qui feront le pari de la diversité et de la robustesse plutôt que celui de la performance et de la destruction du vivant auront un avantage certain. Il faut encourager nos politiques à avoir le courage de s’opposer aux lobbies pour sortir de cette logique uniquement productiviste et répandre les techniques agricoles qui travaillent avec le vivant plutôt que contre lui. Cette révolution est profonde et doit être accompagnée avec douceur et conviction à tous les échelons. Nous espérons que La Théorie du Boxeur et les animateur.ice.s qui l’accompagnent y contribueront.